Par Issaka Herman TRAORE – Mars 2006 I. Historique de la Société Civile
La notion de Société Civile a connu dans son histoire un renversement complet de sens. De l’antiquité au XVII siècle, la société civile est opposée à l’Etat de nature, elle signifie toute société politiquement organisée. Le concept trouve sa formulation systématique en 1821 dans les principes de la philosophie du droit de Hegel. Par l’introduction du concept, Hegel a voulu mettre en relief la modernité du changement politique de l’époque, avec les notions de la séparation de la « vie civile » et de la « vie politique », de la société et de l’Etat. Des penseurs comme Alexis de Tocqueville et Antonio Gramsci, ont contribué comme Hegel au discours sur la société civile, particulièrement Gramsci dont le point de vue a beaucoup influencé les luttes en Europe de l’Est et en Amérique latine contre les régimes dits « totalitaires ». Mais il a été longtemps oublié et relégué aux calendes grecques. C’est surtout vers la fin du 20ème siècle avec les évènements en Europe de l’Est que le concept refait surface. Le fait d’avoir été longtemps oublié s’expliquerait par les situations de colonisation en Afrique où les droits de « citoyens / humains » étaient refusés aux colonisés (selon l’approche Hégélienne) et en Amérique latine ou des luttes armées étaient organisées contre le colonialisme (selon l’approche Gramscienne). (David Lewis : p 4)
En effet pendant longtemps les spécialistes des sciences sociales ont analysé et décrypté la vie en société en deux pôles. Le pôle économique ou marché et le pôle étatique ou gouvernement. Ainsi pendant de longues années les théoriciens se sont focalisés sur ces deux pôles oubliant dans leurs argumentaires la possibilité ou l’existence d’un troisième pôle se situant entre le marché et l’Etat/entre l’économie et le gouvernement. Mais à la faveur des évènements de la chute du mur de Berlin et les problèmes dans la plupart des pays de l’Europe de l’Est, les analystes concordent sur l’existence d’une troisième dimension qui se situerait entre le marché et l’Etat. A l’analyse il était évident que tous les membres d’une société à travers le monde, ne se subdivisaient pas entre le marché, c’est-à-dire ceux qui ont le pouvoir économique ou qui influence les politiques économiques du marché. Et à l’opposé ceux qui avaient la destinée de la gestion politique (Etat/Gouvernement) des sociétés. En effet il y avait une grande partie qui était en dehors des deux pôles et qui subissaient les actions et les décisions des deux premiers ci-dessus cités.
La première définition de cette fin du 20ème siècle, vient du Centre pour la Société Civile (Center for Civil Society) de la London School of Economics. Cette définition au départ avait pour but de guider la recherche et l’enseignement, mais elle est actuellement jugée trop rigide. Elle stipule que : « La société civile fait référence à l’ensemble des institutions, organisations et mode de pensées/comportements, situés entre l’Etat, le monde des affaires et la famille. Spécifiquement elle inclut les organisations caritatives, volontaires de toutes sortes, les institutions philanthropiques, sociales et politiques, les autres formes de participation et d’engagements sociaux, et toutes les valeurs et particularités culturelles associées à celles-ci. »
II Diverses définitions de la Société Civile Outre [1] la définition du centre pour la société civile, plusieurs autres définitions sont utilisées actuellement à travers le monde. Ainsi pour certains sont automatiquement exclus de la société civile, les groupes tels que :
Les institutions gouvernementales.
Les institutions commerciales à but lucratives.
Les dynasties, royautés ou groupe ethnique, par extension tout groupe où les membres sont affiliés par la naissance. Pour d’autres :
« La société civile se définit comme l’ensemble des associations qui existent en dehors, de l’Etat ou du marché. Et qui maintiennent un certain degré d’indépendance et d’autonomie, et ont le potentiel et les capacités de proposer et de promouvoir des points de vue, des idées, des politiques et des actions alternatifs à ceux proposés par l’Etat et le marché. » Où encore : « La société civile ce sont les groupes autonomes vis-à-vis de l’Etat, à but non lucratif, non familial, ou ethnique. Mais qui constituent où sont membres de la vie collective. »
Le point commun de toutes ces définitions est le caractère non étatique des OSC d une part et d autre part leur caractère non lucratif et surtout de défense des intérêts des populations contre le pouvoir économique national ou mondial, ou le pouvoir des Etats et des institutions internationales . A côté de toutes ces définitions, il faut noter l’analyse exclusive et inclusive des différentes définitions.
Selon les défenseurs de l’analyse exclusive : Seules les organisations qui supportent activement le processus démocratique sont considérées comme membre de la société civile.
Les organisations qui ne sont pas engagées avec l’Etat sont membres de la société civile.
Par contre celles qui font la promotion des valeurs non démocratiques sont exclues de la société civile.
La société civile est composée de groupes tels que : les syndicats, les associations professionnelles, les mouvements populaires, les organisations caritatives, philanthropiques et les ONG.
L’avantage certain de cette définition exclusive, est sa stratégie claire qui supporte et sous tend que certaines organisations vont ou peuvent entraîner le changement démocratique. Par contre entre autres désavantages de cette notion exclusive on a : Sa tendance à prendre en compte seulement, les organisations qui sont similaires ou familières du modèle occidental de la société civile.
Elle exclut un grand nombre d’association ou vie associative dans les pays du sud, notamment celles qui ne répondent pas aux critères des OSC du Nord.
Elle aboutit à une idéalisation de la société civile.
Par contre pour les défenseurs de l’analyse inclusive : La société civile est un vaste champ associatif de divers groupes, souvent les uns en conflit avec les autres.
La société civile ne fait pas de jugement sur l’effectivité d’une organisation à promouvoir ou supporter la démocratie, engagée avec l’Etat ou non, encore moins sur les valeurs qui sont promues.
De ce fait pour les tenants de cette théorie, supportée la société civile est souvent sans objet ou fondement sérieux, à moins de spécifier clairement quels types ou groupes de la société civile doivent être supportées.
Les avantages d’une telle analyse sont : Elle reconnaît que la société civile a plusieurs rôles et fonctions, et non seulement la promotion de la démocratie.
Elle reconnaît la complexité de la société civile à travers différents contextes culturels et politiques. Elle demande une analyse sociale, en lieu et place d’idées préconçues avant de s’engager avec des groupes dans la société civile.
On reproche à cette analyse inclusive, les désavantages suivants : Elle refoule l’idéalisme accompagnant la notion de société civile.
Elle demande beaucoup plus de précisions quant à l’utilisation de concepts tel que « Renforcement de la société civile. » III Société Civile et Etat
Deux points de vue majeurs caractérisent les relations entre la société civile et l’Etat : 1 Le point de vue conflictuel, antagonique et oppositionnel, qui voudrait que la société civile protège les citoyens contre les excès de l’Etat. Ce point de vue trouve son fondement d’une part dans la théorie libérale occidentale, d’autre part se justifie dans les contextes des Etats dominants et puissants (répressifs) . Ces positions sont tirées des situations d’Europe de l’Est et de l’ex Union soviétique.
2 La société civile et l’Etat sont mutuellement interdépendants et ont des rôles complémentaires. Dans ces situations :
L’Etat est faible ou fragile.
Aussi bien la société civile que l’Etat ont besoin d’assistance, de renforcement afin de supporter la gouvernance démocratique.
Il y a l’opportunité de coopération ou de collaboration.
Il y a problème lorsque les apports et aides extérieurs sont dirigés seulement vers la société civile. En schématisant le caractère et le rôle de gestion de la chose politique par l’Etat, nous pouvons définir la politique en ces termes « Qui décide de qui gagne, quoi, où et comment ». De ce fait l’Etat à travers le gouvernement, est l’institution chargée de réfléchir sur les mécanismes et de prendre de telles décisions.
Dans la plupart des pays en voie de développement, le rôle de gouvernance, de définitions de stratégies et politiques de l’Etat pour un meilleur être des communautés est sujet à plusieurs obstacles aussi bien exogènes, qu’endogènes. Ainsi le vide créé par l’incapacité, l’impossibilité pour l’Etat de remplir son devoir vis-à-vis des peuples, ou souvent son incompétence, ouvre le champs aux organisations de la société civile, dans des domaines, qui naturellement relevaient de la compétence de l’Etat. On peut citer entre autres domaines : l’éducation, la santé, l’agriculture, etc..
Entre les pressions exogènes des institutions internationales et autres bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux, il convient de noter le rôle joué par les élites et les diplômés des pays en voie de développement. En effet dans beaucoup de pays, ces derniers mettent en avant leurs intérêts personnels au dessus des intérêts de la grande masse. Comme le signifie Alan Whaites « Entre les ambitions de l’élite, et les stratagèmes de survie des masses, l’Etat apparaît survivre souvent comme une vitrine, un drame politique, avec une audience plus ou moins encline à suspendre sa désapprobation ». (Alan Whaites, Development in Practice, Vol 8, No 3, 1998). Cette faiblesse structurelle et organisationnelle des Etats s expliquant par le manque souvent des ressources humaines, financières ou logistiques, va donner naissance à des organisations de la société civile assez forte. Cette force vient du contact régulier entre ces organisations et les masses d’une part et d’autre part l’accompagnement quotidien dont ces organisations font montre aux populations pour l’amélioration de leurs moyens et conditions d’existence. Cet état de fait dans bien de pays, au lieu de solidifier, les relations entre l’Etat et les organisations de la société civile, va au contraire créer une incompréhension, souvent une rivalité ou inimitié.
IV Stéréotypes et stigmas sur les organisations de la Société Civile A la lumière des éléments ci-dessus, il est indéniable que les organisations de la société civile partout dans le monde de nos jours constituent un contre poids social pour les gouvernements et l’ordre économique mondial. Elles sont devenues une espèce de baromètre social, toutefois la confusion est rapide, en ce sens que pour beaucoup de personnes aussi bien au sein des organisations de la société civile que des gouvernements perçoivent la société civile comme un contre pouvoir, voire un ramassis de mécontents, d’aigris et autres opposants.
En vérité les organisations de la société civile et l’Etat sont des partenaires dans certaines situations et adversaires dans d autres, surtout dans les pays en voie de développement où les Etats croulent sous le poids du diktat des institutions internationales (FMI, Banque Mondiale, OMC) avec leurs conditionnalités et leurs corollaires de misère, de paupérisation, de décérébration, et d’acculturation des communautés. Il convient de noter que le rôle des organisations de la société civile tant au niveau national, régional, qu’international, est de défendre les intérêts des communautés contre les politiques et stratégie des Etats ou de l’ordre économique mondial, qui empêchent un meilleur épanouissement économique, social et culturel des communautés. Cette défense des intérêts se fait souvent en collaboration avec les Etats, ou uniquement à travers un réseau d’organisation de la société civile.
V Les luttes de la Société civile pour une Autre mondialisation à travers le monde : De l’Autre Davos à Porto Alegré
V.1 Mondialisation & Consensus de Washington V.1.1 Le consensus de Washington
A la fin des années 80 [2], John Williamson eût la brillante réflexion du libre marché, plus connue dans le monde de l’économie mondiale comme le « consensus de Washington », qui aura une emprise totale sur les politiques de développement des années 80 à 90. En 1989, l’économiste John Williamson, chercheur à l’Institute for International Economics à Washington a compilé une liste des mesures de politique économique qu’il appela le « consensus de Washington » les plus recommandées avec notamment la discipline fiscale, la réforme des impôts, la déréglementation, la libéralisation des taux d’intérêt, des taux de change concurrentiels, la réorientation des dépenses publiques, la libéralisation des investissements étrangers directs et le renforcement du droit à la propriété. Selon John Williamson, le libre marché aura pour conséquence une croissance et un développement économique pour les pays qui l’appliquerait. A cet effet les dix principes suivants vont constituer la bible du consensus de Washington :
1 Une discipline fiscale
a Equilibre budgétaire
b Baisse des prélèvements fiscaux sur les revenus pour privilégier la TVA (Taxe sur la Valeur Ajoutée), ce qui a pour conséquence d’augmenter les inégalités, les plus pauvres payant la même quote part que les riches sur les produits achetés
c Démantèlement des droits de douane des pays moins développés sans contrepartie de la part des pays riches 2 Une redirection de la priorité des dépenses publiques vers des secteurs tels que : la santé, l’éducation et les infrastructures.
3 Une réforme des taxes, incluant un élargissement de la base de taxation et réduisant les taux marginaux de taxe.
4 Des taux d’échange compétitifs et unifiés.
5 Une sécurisation du droit à la propriété.
a Problème des brevets posés par les industries sur des ressources naturelles industriellement inexploitées, comme sur la pharmacopée traditionnelle andine, pour ne citer qu’elle
6 Une dérégulation.
a Elimination de tous les obstacles à la concurrence
b Fin de la protection des industries émergeantes du pays
c Diminution ou suppression des garanties de travail, contrôles sociaux et environnementaux
7 Une libéralisation du marché.
a Suppression des protections douanières
Ce qui a pour résultat l’éradication de l’industrie nationale naissante, ou peu adaptée au marché, au profit de l’investissement étranger (transnationales). A partir de là, dépendance aux produits importés (fin de l’autosuffisance) et aux devises internationales ($ principalement) puisque les importations se payent en devises…
8 Ouverture totale des économies à l’investissement direct
a Ce qui permet aux Multinationales d’investir un marché où les entreprises nationales ne sont pas encore concurrentielles…
9 La privatisation.
a Pertes d’emplois énormes
b Perte du contrôle de l’Etat sur les prix des services de bases comme l’eau, l’électricité, la téléphonie.
10 Une libéralisation financière
a Taux fixés par le seul marché des capitaux
b Fin de l’autonomie financière des gouvernements
c Pas de normes, ni de contrôles des gouvernements sur ce que font les multinationales
Ce consensus a eu pour principaux défenseurs la Banque mondiale, le FMI, et les agences du gouvernement des Etats-Unis. Le corollaire de ce consensus dans les pays en voie de développement fût : le PAS, la privatisation, la libéralisation du marché, entraînant une paupérisation galopante et une main mise des multinationales sur les économies à travers le monde. Ainsi le désengagement des Etats dans certains secteurs afin de limiter les dépenses publiques, n’était qu’une farce intellectuelle afin d’ouvrir le champs aux multinationales, une farce à laquelle s’est laissée prendre consciemment ou inconsciemment les dirigeants des pays en voie de développement. De ce fait comme le souligne Stiglitz [3], l’orientation Keynésienne du FMI, qui mettait l’accent sur les échecs du marché et le rôle pour le gouvernement de créer l’emploi, a été remplacé par la pensée du libre marché des années 80, partie intégrante du nouveau consensus de Washington, un consensus entre le FMI, la banque mondiale et le trésor américain, qui définit les « bonnes » politiques pour les pays en développement. C’est du reste pour cette raison que certains alter mondialistes parlent plutôt d’Américanisation du monde et non de mondialisation.
V.1.2 La Mondialisation Selon Andrew Heywood [4], la globalisation ou mondialisation est l’émergence d’un système complexe d’interconnexions, qui signifie que nos vies sont intensément touchées par des évènements qui se produisent , des décisions qui sont prises, à de très grandes distances de nous (en terme de lieu d’habitation).
De ce fait la mondialisation fait fi des aires géographiques, des frontières territoriales, et subordonne le local au global. Nous dirons que la mondialisation est cet ensemble composé d’institutions internationales, de multinationales, des gouvernements de certains Etats, édictant des stratégies, des politiques et des conventions à l’échelle mondial, sans se soucier de leurs effets sur les communautés. En fait cet ensemble est conscient des effets négatifs de son mode de pensée, mais étant rassuré par ces relais et alliés au niveau local, national, sous régional, se laisse guider par les intérêts des multinationales et de certaines grandes puissances occidentales, les Etats-Unis d’Amérique en tête. Comme le souligne Joseph Stiglitz : « …Nous avons un système qui devrait être appelé gouvernance globale sans gouvernement global, un système dans lequel quelques institutions – la Banque mondiale, le FMI, l’OMC – et d’autres parties – la finance, le commerce, les ministères du commerce, étroitement liés à certains intérêts commerciaux et financiers – domine la scène, mais un système dans lequel la majorité de ceux qui sont affectés par leur décision sont laissés sans voix. » (Joseph Stiglitz, Mondialisation & Its discountents, pp 21-22, Penguin Books, 2002 London). Contrairement à l’idée généralement répandue dans l’opinion publique, la mondialisation n’est pas seulement d’ordre économique, elle est d abord technologique mais aussi d’ordre culturelle (l’American way of Life), politique (la démocratie à l’occidentale est la meilleure forme de gouvernance), environnementale (le réchauffement de la terre lié aux gaz a effet de serre), scientifique, intellectuelle, etc.
Face à cette globalisation de la pensée du libre marché et de l’emprise des multinationales sur l’économie mondiale ; à travers le monde des associations, syndicats, ONG, d’éminents penseurs, universitaires et même des partis politiques, commencent à élever la voix pour protester contre cette politique et proposent d’autres alternatives à la mondialisation. V.2 De l’Autre Davos à Porto Allègre
V.2.1 L’Origine des fora sociaux En 1971 [5] à Davos en Suisse se réunissent les décideurs du monde politique, économique et même social, c’est le début du forum économique mondial. Ainsi chaque année depuis 1971, en fin janvier ces différents décideurs se rencontrent de façon informelle à Davos, sur des hauteurs, retranchés, loin de la vindicte populaire.
En 1999 [6] sur l’initiative de ATTAC a lieu le premier sommet de l’autre Davos, qui est une riposte à la rencontre de Davos, elle réunit cinq mouvements sociaux des cinq continents et de secteurs tout à fait différents : les sans terre du Brésil, les syndicats ouvriers de Corée du Sud, les coopératives agricoles du Burkina, le mouvement des femmes africaines du Québec et celui des chômeurs de France. Comme le souligne Florencio Artigot : « La première conférence de l’autre Davos a eu lieu à Zurich en janvier 1999. L’organisation ATTAC est la colonne vertébrale de cette manifestation. Selon les organisateurs, la conférence donne la parole à des opposants politiques en provenance des régions touchées par la guerre et montre ainsi que les « dialogues » orchestrés par les global leaders de Davos doivent être contrés par des initiatives venues d’en bas, qui s’appuient sur les expériences et les revendications des mouvements sociaux. » (www.letemps.ch, Florencio Artigot, Autorités et anti mondialisation montrent leurs muscles avant le forum économique de Davos, 2003). Ainsi à la suite de l’autre sommet de Davos, les mouvements sociaux, les syndicats, les associations, les ONG, les minorités, etc s’organisent à travers le monde, par des échanges divers (Seattle en 1999, Washington en 2000) qui vont aboutir au forum social mondial, Le premier Forum social mondial aura lieu du 25 au 30 janvier 2001 à Porto Alegre, dans l’Etat de Rio Grande do Sul, la plus grande rencontre des alter mondialistes. Au-delà du forum social mondial chaque continent organise son forum social continental, occasion de relever les tares du néolibéralisme, de proposer de nouvelles alternatives à la théorie de la pensée unique, et surtout un cadre d’échanges des expériences dans la lutte pour « Un autre monde est possible ».
V.2.2 Les Luttes à travers le monde Les multinationales sont des compagnies / industries qui mènent des activités dans plusieurs pays. Grâce à la libéralisation du marché, ces compagnies maximisent leurs profits en délocalisant leurs unités de production dans des pays où la main d’œuvre est bon marché et les matières premières moins chères. Le profit issu de ces activités est d’autant plus maximal en ce sens que les produits finis sont vendus dans plusieurs marchés (pays), où les industries et compagnies locales sont obligées de se plier aux accords du consensus de Washington. Le pire [7] avec ces compagnies multinationales est le non respect du droit de travail, des conventions internationales de protection de l’environnement, ainsi que les taxes et les impôts par le truchement de la corruption alors qu’elles représentent 2/3 du commerce mondial, produisent 25% de la production mondiale et emploi 5% de la main d’œuvre active mondiale.
Face à cette donne, les communautés, les travailleurs, les activistes environnementaux, les paysans, etc commencent à élever leurs voix contre ce système basé seulement sur le profit au détriment des hommes. Plusieurs luttes ont été menées avant et après Porto Alegre, on peut citer : le cas du Nigeria où les Ogonis se sont soulevés en 1995 contre les compagnies pétrolières, laquelle protestation a conduit à la pendaison de l’écrivain Ken Saro-Wiwa. L’affaire CEMOB, la compagnie d’exploitation aurifère qui a fait coulé beaucoup d’encre et de salive au Burkina Faso, pour ce qui concerne la zone Afrique, la liste n’étant pas exhaustive. En occident, ce genre de protestation sont légions, on peut citer : la protestation de Wexford (Irlande) en 1978 contre la construction d’une centrale nucléaire. En Décembre 1999, les manifestations de Seattle à la rencontre de l’OMC. La manifestation de Gènes (Italie) en Juillet 2001, où plus de 200 000 personnes ont protesté pour la suppression de la dette des pays du tiers monde, pour un environnement mondial sain, et pour le respect des droits des travailleurs. Dans la même année [8], la confédération internationale des syndicats libre en collaboration avec la FIFA, mettait au point un code des bonnes pratiques de travail, suite à des situations grave de travail des enfants dans des unités de fabrique de ballon de football au Pakistan et en Inde. Suite aux inspections et contrôles de la FIFA, le BIT a sponsorisé la scolarisation de 6 000 à 15 000 enfants dans cette industrie au Pakistan. C’est ainsi que la campagne « Carton rouge au travail des enfants » a été lancée en 2002 avant le mondial.
Ainsi il est de plus en plus demandé aux multinationales, au-delà de l’accès libre au marché partout dans le monde, qu’elles soient responsabilisées quant aux impacts de leurs activités et opérations sur les communautés dans le monde et sur l’environnement. La pression internationale des ONG, des syndicats et des mouvements sociaux a entraîné, chez la plupart des multinationales la rédaction des « codes de conduite » pour le travail, respectant et accordant le minimum de droit aux travailleurs. Mais en vérité cela ressemble beaucoup plus à un effet de mode qu’à un désir réel d’éthique dans les affaires, ce qui conforte les alter mondialistes dans leur pression continue vis-à-vis des multinationales, du FMI, de la Banque mondiale et des différents gouvernements celui des USA en tête. V.2.3 Quelques figures de la mondialisation
Sur 100 entreprises, industries, compagnies dans le monde, 51 sont des multinationales.
Les revenus de la vente des huiles Shell sont équivalents à l’ensemble de l’économie sud africaine.
2% du budget de marketing de Nike sont nécessaires pour doubler le salaire de ces ouvriers en Indonésie. V.2.4 La société civile au Burkina Faso
La société civile au Burkina Faso est à l’image des différentes définitions, c’est à dire ambiguës. Néanmoins un travail remarquable a été réalisé par le CGD dans sa tentative de répertorier et classifier les différentes OSC existantes au Burkina. Au total 446 OSC répertoriées, dont la répartition suivante par composante : Organisation féminine (63), instituts de recherche et de formation (16), organisations syndicales (12), organisations religieuses (25), défense des droits humains (46), presse privée (30), ONG et association de développement (130), mouvement de jeunesse (33), personnes dites marginalisées (25), organisations paysannes (56), organisation à caractère culturel et artistique (15). Sources : CGD PNUD, Cellule Nationale de Renforcement des Capacités des Organisations de la Société Civile. Sur le plan des luttes de la Société Civile au Burkina les plus remarquables sont : Le mouvement populaire du 03 Janvier 1966
La lutte du collectif suite aux événements de Sapouy le 13 Décembre 1998
La lutte pour l’arrêt des subventions des producteurs de coton du Nord en 2003.
Bibliographie Alan Whaites, Development in Practice, Vol 8, No 3, 1998
Andrew Heywood, Politics, 1997 David Lewis, Civil Society in Non-Western contexts : Reflection on the ‘usefulness’ of a concept, Civil Society Working Paper 13, October 2001, CCS, London School of Economics
Florencio Artigot, Autorités et anti mondialisation montrent leurs muscles avant le forum économique de Davos, 2003 www.letemps.ch François Houtart, la mondialisation des résistances et des luttes contre le néolibéralisme, Mondialisation , Bruxelles, Ed GRIP, 2002.
Global Solidarity, 2003 Joseph Stiglitz, Mondialisation & Its discountents, Penguin Books, 2002 London
London School of Economics, What is civil society, http:// www.lse.ac.uk/collections/CCS Michael P Todaro & Stephen C, Economic Development, Pearson Education Ltd, 2003 United Kingdom
Paddy Reilly, Political participation : INTRAC Seminar paper, 2000 Trocaire, Trade & Globalisation, 2001
www.mondialisation.be [1] Paddy Reilly, Political participation, pp 1-4, 2000
[2] Michael P Todaro & Stephen C, Economic Development, pp 702-703 [3] Joseph Stiglitz, Globalisation and Its discountents
[4] Andrew Heywood, Politics 1997 [5] www.mondialisation.be
[6] François Houtart, la mondialisation des résistances et des luttes contre le néolibéralisme, Mondialisation , Bruxelles, Ed GRIP, 2002 [7] Trocaire, Trade & Globalisation, 2001
[8] Global Solidarity, 2003